Depuis le printemps 2016, une campagne pour la reconnaissance du travail en milieu étudiant est menée par les Comités unitaires sur le travail étudiant (CUTE). Les CUTE sont des comités autonomes constitués d’étudiant.es basé.es sur un lieu d’enseignement et qui, par-delà les idéologies politiques qui les animent, ont choisi de travailler ensemble sur cette question. Cette campagne s’est tout d’abord focalisée sur l’aspect le plus visible de la non-reconnaissance du travail étudiant: les stages non rémunérés. Au cours de la dernière année, on a pu constater que cette revendication a gagné en popularité sur les campus, allant notamment rejoindre des milieux d’études traditionnellement plus distants de la politique étudiante. Les CUTE ont ainsi été des acteurs principaux de cette mobilisation rassembleuse qui se poursuivra cet automne. La Concordia Student Union (CSU), l’association regroupant l’ensemble des étudiant.es au premier cycle de l’Université Concordia, se joint elle aussi au mouvement et fera de la question des stages non rémunérés la priorité de son plan d’action pour les prochains mois. Il est maintenant temps que la lutte pour la rémunération des stages batte son plein à Concordia.
Mais la question des stages non rémunérés n’est que la pointe de l’iceberg de la non-reconnaissance du travail étudiant. C’est pourquoi les CUTE ont mis de l’avant une analyse critique du travail reproductif appliquée à l’ensemble de la condition étudiante. Ce qui distingue notamment le travail productif de celui reproductif, c’est la façon dont il est valorisé: ce qui touche à la production est salarié tandis que ce qui concerne la reproduction, c’est-à-dire tout le travail effectué en dehors des lieux de production traditionnels (usines, bureaux, lieux de services, etc.) est quant à lui perçu comme un effort « naturel », « essentiel » à la vie. Le travail reproductif est ainsi en large partie assumé historiquement par des femmes et trouve sa justification dans l’attribution essentialiste des rôles genrés selon laquelle savoir prendre soin des autres et de la maison, des tâches ménagères aux tâches sexuelles, ne serait simplement pas un travail et ne serait donc pas à valoriser par le biais d’un salaire. Pourquoi? Où commence et s’arrête le travail? Qui le décide? Quelle est la valeur à donner au travail? Poser ces questions concrètement, c’est réfléchir à ce qui régule le rythme de nos vies dans cette société, en se donnant collectivement comme défi de repenser ce qu’est le travail.
La condition étudiante est une zone de transition entre deux stades: la vie où l’on dépend de l’institution familiale et celle où l’on s’en affranchit économiquement par le travail. Durant cette phase, on devra payer et s’endetter massivement. On devra étudier, rédiger, créer du contenu; pour plusieurs d’entre nous, nous irons apprendre le métier directement sur le plancher, lors de stages non rémunérés mais pour lesquels nous payons des frais de scolarité. En réalité, nous sommes déjà des travailleurs et des travailleuses, à qui on refuse ce statut. Notre travail est considéré comme en étant un de reproduction: on fait de nous des apprentis en formation appelés à remplacer d’autres « véritables » travailleuses et travailleurs sur le marché du travail. L’université est ainsi une usine à diplômes où l’on doit payer pour y accéder et où les tâches quotidiennes de l’étudiant.e sont invisibilisées, admises comme étant* de facto* du travail fait gratuitement. Les CUTE défendent plutôt l’idée qu’il est nécessaire de considérer le travail reproductif à la lumière de ce qui est valorisé comme du travail productif. En demandant un salaire pour le travail étudiant, il s’agit de mettre un terme autant à la vision corporatiste de l’éducation qui fait de nous des utilisateurs-payeurs que de critiquer les séparations entre les différentes catégories de travailleurs et de travailleuses.
C’est sur ces questions qu’un Comité unitaire sur le travail étudiant se penchera à Concordia cet automne. Si elles vous interpellent et que vous désirez vous joindre à une campagne dynamique déjà bien avancée dans de nombreux cégeps et universités, n’hésitez pas à nous contacter à cute.concordia@gmail.com.
**RÉUNION DE FONDATION DU COMITÉ UNITAIRE **
SUR LE TRAVAIL ÉTUDIANT (CUTE) DE CONCORDIA
Lundi le 25 septembre, 18 heures
Au CSU Lounge (7e étage du pavillon Hall)
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Pour te tenir informé.e sur la lutte pour la pleine reconnaissance du travail étudiant, pour en discuter ou pour y contribuer, tu peux nous contacter via la page CUTE Campagne sur le travail étudiant.