Secteur étudiant du Réseau européen des syndicats alternatifs et de base:
Union syndicale étudiante (USE) – Belgique
Solidaires étudiant-e-s – France
SUD Étudiant-e-s et Précaires – Suisse
Bruxelles, Paris, Lausanne, le 19 novembre 2018
Vous retrouverez l’appel sur
www.salaire-etudiant.org
et www.wage-for-students.org
Aujourd’hui, lundi 19 novembre 2018, la grève des stagiaires au Québec débute. Nos
camarades des Comités unitaires sur le travail étudiant (CUTE), avec qui nous travaillons, l’organise et nous leur apportons tous nos messages de solidarité: qu’elle soit victorieuse! Les CUTE portent la revendication d’une rémunération pour tous les stages et plus généralement de celle d’un salaire étudiant. Cette lutte est exemplaire. Elle fait très fortement écho à nos réalités et nous nous plaçons dans son sillage.
Le développement de nouvelles formes de travail gratuit, sous-salarié, sans statut comme le sont entre autres les stages vient s’ajouter aux figures plus classiques de celui-ci, comme le travail domestique très majoritairement assumé par les femmes. Nous avons affaire à un continuum du travail non payé qui trouve toujours des formes nouvelles pour s’imposer. Le travail de formation en fait aussi partie. Les étudiant-e-s sont des travailleurs/euses et leur activité essentielle dans la production sociale générale doit être reconnue.
Un appel européen est aujourd’hui lancé à partir du secteur étudiant du Réseau européen des syndicats alternatifs et de base. Il est adressé à toutes les organisations, groupes, collectifs d’étudiant-e-s, de stagiaires, d’apprenti-e-s et au-delà, intéressés à débattre et à s’organiser autour de cette question centrale du travail gratuit et de la revendication du salaire étudiant.
Ce texte est la première étape d’un processus que nous espérons fructueux. Il agit comme un texte en proposition et fixe un premier horizon autour duquel nous rassembler. À la suite de cette première étape, nous organiserons une assemblée européenne avec l’ensemble des forces sociales qui nous aurons contactées et qui sont intéressées à ouvrir un avenir revendicatif et stratégique sur le salaire étudiant.
Notre objectif est la construction d’un mouvement social offensif, capable de porter cette revendication stratégique par une pratique systématique de la construction du rapport de force, l’action directe et l’auto-organisation des premiers/ères concerné-e-s.
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Appel pour un salaire étudiant
Face à la situation qui se développe en Europe comme dans le monde, face aux attaques répétées que nous subissons, face à la dégradation continue de nos conditions de vie et de travail, nous nous devons d’avancer une nouvelle logique, qui ouvre de nouveaux horizons de lutte, et qui permette de repenser notre condition à l’aune d’un projet émancipateur.
Considérant :
Que chaque personne en formation, en emploi ou pas, est systématiquement dévaluée, que le pouvoir économique et politique lui dénie tout statut de pleine participante à cette société, lui dénie toute autonomie morale, sociale et matérielle ;
Que les personnes en formation sont vouées à un état toujours plus long de minorisation sociale, et deviennent la nouvelle variable d’ajustement vers le bas des conditions de travail et de revenu de tou-te-s les travailleurs/euses;
Que ces personnes, quelle que soit la nature de leur formation, fournissent une production intellectuelle et matérielle valorisée directement ou indirectement par les entreprises, par l’académie, par la recherche;
Que si parfois la production de ces personnes en formation est mesurable et exploitée, elle ne l’est pas toujours. Elle reste néanmoins partout réelle et tangible, de par la contribution culturelle, sociale et éducative qu’elle génère. Si elle ne répond pas à la définition capitaliste du travail, elle n’en est pas moins du travail au sens d’une contribution effective aux besoins sociaux;
Que l’émancipation des personnes en formation est impossible sans une remise en cause globale des institutions qui contribuent structurellement à leur précarisation;
Nous exigeons un salaire étudiant, prenant effet dès la fin de la scolarité obligatoire, et permettant à la fois d’offrir une autonomie réelle aux personnes en formation, en les libérant de la tutelle étatique, familiale et/ou patronale, mais permettant aussi, et surtout, de reconnaître socialement le travail qu’ils/elles font et ont toujours fait, sur leurs lieux de formation.
Car, nous affirmons :
Que l’étudiant-e, l’apprenti-e, le/la stagiaire est un travailleur/euse ;
Qu’en tant que travailleur/euse, chaque personne en formation a droit à la reconnaissance de son travail, à l’indépendance matérielle, à des conditions décentes d’études et aux droits syndicaux et démocratiques ;
Que tout-e travailleur/euse a droit à une formation publique, gratuite, critique et émancipatrice. Il est donc nécessaire d’instaurer, jusqu’à la majorité, l’école obligatoire en tronc commun. Cette première qualification est immédiatement associée à un salaire étudiant pour la suite de la formation.
C’est autour de ces axes d’analyse et de ces revendications communes que nous unissons nos forces, au-delà des frontières nationales, contre les attaques répétées du Capital, et pour construire une offensive unitaire et internationale du monde du travail.